Quelques mots d'introduction

Le nom de ce blog consacré à la BD reprend le titre d'un album de la série "Isabelle", en hommage à ses auteurs, André Franquin, Raymond Macherot, Yvan Delporte et Willy Maltaite (dit Will), qui surent, mieux que quiconque, faire naître de vastes univers dans notre imaginaire au travers de leurs récits graphiques. Ce titre symbolise bien l'empire qui peut être contenu dans l'espace réduit des planches d'un album.

dimanche 19 décembre 2010

Benoit Brisefer a 50 ans

En 1949, le quotidien belge "le soir" accueille la série "Poussy" de Peyo (Pierre Culliford). A compter de 1950, ce journal publie également la série "Johan" que Peyo a créée antérieurement dans "la dernière heure". Deux ans plus tard, cette 1ère création sera publiée par le journal "Spirou" où elle trouvera sa forme définitive. En 1960, Charles Dupuis demande à Peyo de rapatrier également la série "Poussy" dans le journal "Spirou". Ennuyé de se désengager du journal "le soir", Peyo imagine une nouvelle série de remplacement : l'histoire d'un petit garçon terriblement fort, qui redevient un enfant ordinaire dès qu'il est enrhumé. Apprenant le projet, Charles Dupuis insistera pour publier également les aventures de cet enfant qui allait s'appeler Benoit Brisefer. Obligé d'accepter, Peyo créera finalement une autre série, "Jacky et Célestin", pour le journal "le soir".

Devant faire face à plusieurs séries, Peyo recrute Will (Willy Maltaite) pour assurer les décors de Benoit Brisefer. La première histoire "les taxis rouge" sera publiée dans le journal "Spirou", le 15 décembre 1960. La série connaît très rapidement un grand succès. Débordé de travail, Peyo doit toutefois recruter un jeune dessinateur pour le remplacer sur la série. François Walthéry, qui s'est déjà fait la main sur "Jacky et Célestin" et sur les décors des Schtroumpfs, reprend la série en 1956, à l'occasion du 3ème épisode. Les scénarios restent assurés par Peyo. Accaparé par le succès de sa propre série, "Natacha, hôtesse de l'air", François Waltéry abandonnera toutefois Benoit Brisefer après le 6ème épisode. Pour le dernier épisode scénarisé de son vivant, Peyo confira le dessin de son personnage à Albert Blesteau. Après le décès de Peyo, son fils Thierry Culliford, reprendra en main la destinée de Benoit Brisefer en collaboration avec le dessinateur Pascal Garray (et avec l'aide de Dugomier au scénario pour le 1er épisode). Le dernier épisode est sorti en 2004 sur un scénario de Frédéric Jannin. Depuis, la série est en sommeil et aucun épisode n'est en préparation,

Les ventes des derniers albums devaient être insuffisantes. ll faut reconnaiître que si le dessin est toujours resté de très bon niveau, les scénarios sont devenus plus basiques après le décès de Peyo. Les nouveaux auteurs semblent avoir perdu de vue que l'esprit de la série ne tient pas uniquement dans les exploits hors norme du jeune garçon, mais également dans le regard que cet enfant porte sur le monde des adultes. Même si ce n'est jamais dit clairement, Benoit Brisefer semble orphelin. Ses seules attaches familiales sont son oncle Placide. Il porte en lui une éternelle mélancolie que l'on devine liée au poids d'une enfance empreinte de solitude ; poids que le secret de sa force accroît encore. Les meilleurs épisodes nous font partager sa découverte des coups bas du monde des adultes ("les taxis rouge"), la démystification du monde merveilleux du cirque ("le cirque Bodoni"), l'évolution de ses repères par rapport à la gentillesse supposée des vieilles dames ("madame Adolphine"), ou encore sa prise de conscience du fait que les gens riches peuvent aussi être des malfrats ("lady Dolphine"). La série ne verse néanmoins pas dans le manichéisme primaire, la rédemption des personnages étant souvent de mise, et les propos plus adultes des histoires sont contrebalancés par l'innocence de Benoit et la préservation de ses principes.

Espérons que de nouveaux scénaristes se proposeront de reprendre la série, en la réactualisant mais sans trahir ses fondements et sa poésie. En attendant, rendons grâce au journal "Spirou" d'avoir commémoré dignement les 50 ans de Benoit Brisefer, dans son numéro 3792 du 15 décembre 2010.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire